Le délit d’écocide semble ne pas retenir l’attention des autorités
Le 22 novembre 2020, la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, et Éric Dupond-Moretti, ministre de la Justice, annonçaient la création de deux délits environnementaux : le délit d’écocide et le délit de mise en danger de l’environnement.
Si cette initiative avait grandement intéressé les associations écolos, malheureusement en cette début d’année il s’avère que ces affirmations n’étaient qu’un coup de communication.
En effet, le projet de loi Climat annoncé le 12 janvier par le gouvernement propose une mesure sans risque pour les pollueurs. S’il est vrai que ces deux nouveaux délits y figurent, la rédaction même du texte légal en rend la mise en œuvre difficile voire impossible. Le projet de loi prévoit ainsi de sanctionner les pollutions des eaux, sols ou l’air, mais seulement si elles découlent d’une « violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement » et si elles « entraînent des effets nuisibles graves et durables sur la santé, la flore, la faune ». Il sera donc difficile de prouver la culpabilité volontaire des pollueurs et de les sanctionner en conséquence, car il s’agit souvent d’actes involontaires ou de non-respect des mesures de sécurité.
Par exemple, si un industriel pollue les eaux, il faudrait prouver qu’il a enfreint volontairement une réglementation alors que dans la plupart des cas ces industriels prennent toutes les précautions pour élaborer des procédures conformes aux normes. La pollution intervient souvent suite à des accidents et donc comme il ne s’agit pas d’une pollution volontaire, ces actes n’entrent pas sous le coup de ce projet de loi.
En plus, il faudrait démontrer également la violation délibérée d’une obligation issue d’une loi ou règlement, alors que quelquefois il s’agit de la violation d’un arrêté d’autorisation d’installations.
Enfin, il faudrait encore démontrer que la pollution a entraîné « des effets nuisibles graves et durables sur la santé, la flore, la faune … susceptibles de perdurer pendant une durée d’au moins dix ans ». Cette condition est encore plus restrictive que l’article L216-6 du Code de l’environnement qui parle « des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune,… même provisoirement ».
En conclusion, si ce projet de loi n’évolue pas, ce nouveau délit d’écocide même s’il prévoit des peines de cinq ans d’emprisonnement et jusqu’à un million d’euros d’amende sera peu et difficile à appliquer dans la réalité et donc sa mise en œuvre sera si restreinte que son intérêt actuel et futur est discutable.
C’est donc une mesure montrant que le gouvernement est conscient des conséquences des pollutions sur la santé et la biodiversité, mais sans être prêt à vraiment sanctionner les auteurs.