L’eau cotée en Bourse, des dérives en perspective pour cette ressource indispensable à la vie

Eh oui, vous avez bien lu : depuis décembre dernier, l’eau est cotée à la Bourse de Chicago !

Le 7 décembre 2020, l’entrée en bourse de cette ressource vitale a fait naître la polémique. En effet, comment ne pas mettre en parallèle le constat des Nations Unies sur la valeur de l’eau lors de son dernier rapport de mars 2021 lors de la Journée mondiale de l’eau avec ce premier marché à terme de l’eau lancé, à la Bourse de Chicago ?

Des marchés locaux concernant l’eau ont déjà existé au Chili. En Australie, où cette ressource est limitée, ce marché est toujours d’actualité. Mais la cotation de l’eau sur un marché à terme, même s’il concerne pour le moment seulement l’eau de Californie, consacre dans les faits que cette ressource vitale devient un produit financier. Dans ces conditions, la Coalition Eau réunissant 250 organisations non-gouvernementales craint, à juste titre, l’apparition de dérives préjudiciables et notamment une spéculation massive. Cela engendrerait l’augmentation du prix de l’eau en mettant à mal le droit fondamental de l’accès à l’eau pour tous consacré par les Nations Unies.

 

À la base, cette cotation en bourse sur le marché des États-Unis a pour objectif d’éviter les spéculations et d’encadrer les prix en cas de sécheresse ou d’incendie par exemple. Néanmoins, encore faut-il se poser la question de savoir pour quelle autre matière première son entrée en bourse permettra à l’avenir de réguler ces prix en faveur des consommateurs finaux ? Difficile exercice quand on sait quelles distorsions de prix engendre la spéculation boursière !

Enfin, certains négociants de matières premières avancent le fait que l’eau sera difficilement transportable. Que pour que l’eau puisse devenir une matière première comme les autres, il faudrait d’abord trouver un moyen d’en transporter de volumes importants sur de longues distances. Toutefois, n’oublions pas que les tankers n’ont aucun mal à transporter déjà d’autres matières premières liquides ou gazeuses sur des longues distances comme le pétrole et le gaz.

Dans tous les cas, cet événement d’apparence anodin dans un temple du capitalisme nord-américain sera à surveiller de près afin de ne pas transformer l’eau dans une matière première négociable au niveau mondial. Cela ne ferait qu’augmenter les inégalités déjà bien réelles concernant l’accès à cette source dont nous avons tous besoin pour notre survie !